Le Sénat haïtien a ratifié mardi, tard dans la soirée, le choix par le président Michel Martelly, de Garry Conille comme Premier ministre, le rapprochant de la Primature. A la fin d’une séance qui aura duré huit heures d’horloge, le vote s'est réparti comme suit: 17 pour, 3 contre et 9 abstentions.
Avant Garry Conille, le président Martelly avait désigné l’homme d’affaires Daniel Rouzier et le juriste Bernard Gousse. Rouzier a été rejeté par la Chambre des députés, Gousse par le Sénat.
Garry Conille, 45 ans, médecin de profession, a travaillé en Éthiopie et au Niger pour l’ONU avant d’être nommé Conseiller technique à la CIRH (Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti) dont l’ancien président américain Bill Clinton et le Premier Ministre haïtien sortant Jean-Max Bellerive sont les co-présidents.
Sa ratification avait été précédée d’intenses négociations croisées entre l’équipe du président Martelly, lui-même et « le Groupe des 16 », à la base du rejet de Bernard Gousse, mais qui a largement voté « pour » mardi soir.
« Je voterai pour Garry Conille », avait lancé, peu avant le vote, le sénateur Wenceslas Lambert (Sud-Est), frère cadet de Joseph Lambert, leader du Groupe des 16.
En revanche, « dans le doute, on s’abstient », avait tonné Annick François, Artibonite, de la plate-forme Alternative dont les membres avaient mené le débat contre Garry Conille sur la base de soupçons relatifs à sa résidence et l’exercice de ses devoirs civiques. « Je recommande le vote contre ou l’abstention », a renchéri pour sa part Steven Benoît (Ouest).
Un problème de nationalité a été soulevé. « Un vide de plus de 14 ans se voit dans la vie du Dr Conille. Selon les rumeurs, il serait Canadien. Nous ne pouvons pas placer un Canadien à la tête du gouvernement haïtien, c’est pourquoi je demande de renvoyer la séance afin d’avoir le temps d’investiguer auprès de l’immigration canadienne pour découvrir la vérité », s’est indigné William Jeanty du parti Konba (Nippes).
Fils de Serge Conille, ancien ministre de Jean-Claude Duvalier au cours des années 80, Garry Conille n’a aucune expérience politique à son actif. La Chambre des députés lui avait accordé un vote massif il y a trois semaines. Les deux étapes de la ratification franchies, il devra se présenter à nouveau devant les deux chambres séparées pour obtenir « un vote de confiance de sa déclaration de politique générale», selon l’article 158 de la Constitution haïtienne.
Au cas où sa déclaration de politique générale obtient le vote de confiance, Garry Conille succédera à Jean Max Bellerive à la tête de la CIRH. Il y deviendra l’alter ego de Bill Clinton. La CIRH est une structure internationale montée pour coordonner l’aide devant servir à la reconstruction d’Haïti après le séisme du 12 janvier 2010 qui avait fait des dizaines de milliers de morts, détruit une bonne partie de la capitale, Port-au-Prince, et laissé plus d’un million de sans-abris.