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À Port-au-Prince comme un peu partout à travers le pays, les chauffeurs de taxi, toutes catégories confondues, assurent le transport des passagers d’un endroit à un autre dans l’ambiance d’une vie de galère. Ils travaillent jour et nuit, les week-ends comme les jours fériés sous la pluie ou sous le soleil de plomb, en quête d’une certaine survie. Leur labeur est loin d’être une sinécure, a constaté Haïti Press Network.
À vrai dire, la vie en général en Haïti est une vie de galérien. C’est la réalité nationale ! Cependant, la situation est plus compliquée pour certains secteurs de la société, notamment les chauffeurs de taxi.
Nous sommes au Portail Léogane. Disons mieux, à la gare routière improvisée et informelle du Grand Sud. À ce lieu, on assure, en dehors de tout contrôle de l’État, le transport en commun vers Léogane, Grand-Goâve, Petit-Goâve, Jacmel, Miragoâne et les Cayes. Il est 10 heures du matin. Les rayons du soleil annonçant l’arrivée de la saison estivale, agresse sérieusement les yeux et la peau. Les activités à cet endroit réputé autrefois dangereux sont toujours très denses.
Les conversations sans fondement des voyageurs, les cris dérangeants des marchands ambulants, les vrombissements des moteurs produisent un brouhaha quasiment indescriptible. Une foule immense fait le va-et-vient à longueur de journée.
On se croise, se frotte, se cogne et s’invective sans se regarder et sans s’arrêter. La vie dans cette galère bruyante se transforme en un vrai enfer avec la proximité des tas d’immondices et des piles de détritus aux différents coins de la station qui caractérise la vie informelle en Haïti. Des odeurs pestilentielles assaillent les narines des usagers que l’habitude a finalement rendus, fort heureusement, insouciants aux nuisances de l’insalubrité.
Les véhicules en provenance des régions du Grand Sud sont en train de se vider de leurs clients. Et, le branle-bas s’installe dans l’air. Comme un seul homme, débardeurs et chauffeurs de taxi se ruent à l’assaut des bus dans une atmosphère de désordre total. Les premiers grimpent hardiment dans les impériales tandis que les deuxièmes saisissent par le bras les premiers débarqués.
Trempés de sueur, ils sont prêts pour toutes les destinations. « Venez avec moi madame. N’allez pas monter dans les bourrettes. Mon taxi est en parfait état », lance un taximan, plus entreprenant, trainant littéralement ses interlocuteurs avec leurs bagages.
Les astuces
On ne fait pas de cadeau en Haïti, surtout dans ce secteur. C’est chacun pour soi et Dieu pour tous. Les chauffeurs sont obligés de faire preuve d’intrépidité et d’audace pour cueillir quelques passagers. Dans un climat de discorde, le plus perspicace et le plus audacieux l’emporte sur ses concurrents immédiats avec qui, tout allait bien quelques minutes avant l’arrivée du véhicule venant de la province.
Les allers et retours ne sont pas réguliers pour les chauffeurs de taxi. Les prix sont négociés à l’amiable entre les concernés. Le chauffeur de taxi, dans ces conditions difficiles, ne se contentent pas seulement d’attendre l’arrivée des clients et de les conduire d’un endroit à un autre. Il est obligé d’établir une stratégie de travail pour être efficace.
Difficiles conditions de travail
Les conditions de travail des chauffeurs de taxi est une des plus déprimantes. Ils fonctionnent au petit bonheur en affrontant les embouteillages, l’humeur volatile des clients et la mauvaise foi des autres chauffeurs. Le conducteur haïtien de taxi ne possède rien de l’attirail destiné à équiper une voiture liée à sa profession comme c’est fait dans d’autres pays. Citons entre autres, compteur kilométrique, indicateur lumineux de tarif, système de communication radio, système d’information trafic, terminal de paiement pour n’indiquer que ceux-là. La faute de règlementation du secteur pénalise généralement les passagers négligents qui n’ont presqu’aucune chance de retrouver un objet oublié.
« L’absence de l’État partout, principalement au niveau de ce secteur, nous force à fonctionner comme des animaux. Les syndicalistes parlent souvent dans le vide. Leurs interventions ne sont pas toujours prises en considération », a indiqué à Haïti Press Network, un chauffeur de taxi.
Il est difficile de savoir les revenus exacts d’un chauffeur de taxi qui risque souvent sa peau en prenant la route trop tôt à l’aube et tardivement la nuit. Il y en a qui conduisent leur propre véhicule, les exploitants qui utilisent un véhicule loué et les conducteurs salariés qui travaillent pour le compte d’un tiers.
Chose certaine, il est un fait certain que la vie des chauffeurs de taxi à Port-au-Prince est une vraie vie de forçat.