Le mur de Berlin, Cinquante ans après....
La capitale allemande commémore ce samedi le cinquantième anniversaire de la construction du mur de Berlin le 13 août 1961. Si ses traces physiques restent modestes, il est toujours très présent dans le souvenir des Berlinois même si leur mémoire est parfois sélective.
« Le mur est une réalité mais il n’est pas réaliste ». Lorsque le président ouest-allemand de l’époque Richard von Weizsäcker prononce ces mots au printemps 1986, il ajoute que le mur qui sépare la ville dont il a été le maire (à l’Ouest) quelques années plus tôt finira par disparaître. Mais il ne peut sans doute pas imaginer comme la majeure partie de ses compatriotes que cela se produirait dès la fin de la même décennie.
« Le mur de la honte » aura séparé pendant 28 ans Berlin. C’est par un dimanche d’août 1961 qu’il est construit par le régime est-allemand. Depuis la création de la RDA, douze ans plus tôt, l’hémorragie humaine a été énorme. Deux millions et demi d’Allemands de l’Est sont passé à l’Ouest dans un Berlin où l’on circule librement. Le nouvel Etat communiste obtient le feu vert de Moscou pour mettre fin à cette situation. Dans un premier temps, des barbelés et autres barrières provisoires sont mises en place à la va-vite.
Des scènes tragiques se déroulent notamment dans la Bernauer Strasse entre le secteur soviétique et français où un mémorial se situe aujourd’hui. Les façades des bâtiments sont à l’Est, le trottoir à l’Ouest. Pendant que des ouvriers murent les fenêtres et autres issues du rez-de-chaussée, des personnes sautent des étages supérieurs pour gagner la liberté. Plus tard, de nombreuses fuites auront lieu par des tunnels, dans des coffres de voitures ou à la nage. 136 personnes trouveront la mort en voulant passer à l’Ouest à Berlin entre 1961 et 1989.
Avec le temps, la RDA perfectionne la frontière baptisée « mur antifasciste » et destinée dans le jargon officiel à se protéger de l’ennemi capitaliste. Des éléments en béton de 3,7 mètres de haut surmontés d’un boyau en demi-cercle sont installés. Deux murs séparés par un no man’s land permettant une meilleure protection sont mis en place.
Un mur ébréché
Avec l’Ostpolitik, la politique de la détente avec l’Est, initiée par la RFA au début des années 70, la situation se « normalise ». Il devient plus facile pour les Allemands de l’Ouest de se rendre à l’Est. Les retraités est-allemands (dont la « perte » économique serait minime pour le régime communiste) sont autorisés à franchir le mur. La république fédérale « rachète » des prisonniers politiques et autres personnes dont la RDA veut se débarasser. Le mur devient pour beaucoup un décor appartenant au quotidien. L’Est et l’Ouest s’efforcent à coup de subventions de faire de chaque partie de la ville une vitrine de leur régime respectif.
L’histoire s’accélère à la fin des années 80. Lorsqu’au printemps 1989, la Hongrie supprime le rideau de fer la séparant de l’Autriche, une brêche s’ouvre pour les Allemands de l’Est pour passer à l’Ouest. La RDA est sous pression. Une opposition monte en puissance. Le régime comprend qu’il lui faut bouger et autorise ses concitoyens à voyager. La mesure ne doit pas signifier une ouverture grandeur nature des frontières. Mais une déclaration malencontreuse d’un haut responsable le soir du 9 novembre 1989 conduit des milliers de Berlinois de l’Est à se presser aux postes frontières. Le mur tombe.
Avant même la réunification le 3 octobre 1990, il aura quasiment disparu entre les deux parties de la ville. Les Berlinois n’ont qu’une hâte, voir disparaître ce symbole de la division de leur ville. Plus de vingt ans après, il n’en reste pas grand-chose. L’ancien checkpoint Charlie, le point de passage légendaire entre l’Est et l’Ouest, où une troisième guerre mondiale a failli éclater, est aujourd’hui un Disneyland livré aux marchands du temple. Des étudiants s’y font un peu d’argent de poche déguisés en garde-frontières est-allemands ; d’autres vendent des morceaux du mur aussi authentiques que les faux soldats.
Quelques dizaines de mètres plus loin, un morceau du mur bien abimé par les amateurs de souvenirs d’autrefois est encore là et longe symboliquement l’ancien siège de la Gestapo, la terrible police secrète nazie, rappelant combien l’histoire se télescope à Berlin. Dans la Bernauer Strasse, un mémorial a été érigé sur l’ancien no man’s land. C’est là que les cérémonies du souvenir officielles se dérouleront ce samedi 13 août avec de nombreuses autres manifestations à travers la ville, dont une minute de silence à midi.
Un nouveau mur invisible
Si le mur a rapidement disparu après sa chute, un autre, invisible, reste. Dans un récent sondage, 83% des ex-Allemands de l’Est soutiennent cette thèse et estiment que les différences subsistent entre eux et leurs concitoyens de l’Ouest. A Berlin, une autre enquête d’opinion a suscité des débats la semaine dernière. Un habitant sur dix juge que la construction du mur était une bonne chose ; un sur quatre partage en partie ce point de vue.
Les historiens expliquent ces résultats par l’importance trop réduite accordée à la RDA dans les programmes scolaires et par le fait que les enseignants les plus âgés ont été socialisés avant 1989 et ne se montrent pas très critiques.
La plus ancienne génération – Berlin-Est concentrait une large partie des élités dirigeantes communistes - ne veut certes plus de la RDA telle qu’elle existait mais n’a pas pour autant l’impression de faire partie intégrante de l’Allemagne réunifiée. Les familles parlent avant tout de leur vie quotidienne et communiquent à leurs enfants une vision tronquée dans laquelle les aspects les plus sombres de la RDA apparaissent peu : la répression, les libertés mises en cause, la police politique ou encore les sévères dommages causés à l’environnement.
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