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Une autre Haiti est elle vraiment possible?

L'amour au feminin pluriel

La littérature a longtemps été en Haïti un petit privilège, sinon la chasse gardée, des classes moyennes aisées. Aujourd’hui encore nous ne sommes pas encre à l’heure de l’existence d’un nombre important d’écrivains issus de la classe ouvrière ou de la paysannerie.

 

 Cependant les choses ont quelque peu évolué et on peut constater l’entrée en littérature de nouvelles figures ne répondant pas au profil traditionnel de « l’écrivain haïtien », tous genres confondus. Le roman en particulier a subi une évolution, le nombre de romanciers ne cessant d’augmenter. Cette évolution n’est pas sans à voir avec le succès commercial de l’opération « Livres en folie », ce rendez-vous annuel du livre qui permet aux lecteurs d’acheter moins cher et leur offre un choix varié.

 

Grâce à la médiatisation de l’événement « Livres en folie » assure aux auteurs une grande visibilité, d’où une certaine précipitation pour faire partie du groupe d’élus dont on verra les photos, dont on lira ou écoutera les entrevues avant et après les triomphales séances de signature.

 

Le livre n’est plus ainsi de l’ordre du mystère, affaire de quelques uns constituant un petit monde prestigieux et occulte. N’importe qui se sent aujourd’hui le droit d’écrire et de publier, comme n’importe qui se sent le droit d’acheter, de lire et d’assumer ses préférences.

 

D’une certaine façon, et c’est là une bonne chose, la vie du livre se démocratise. Mais tout n’est pas rose. Il n’y a pas beaucoup de choses de faites en ce qui concerne l’éducation esthétique du lectorat. Il n’y a pas non plus, chez un grand nombre de nouveaux venus dans l’écriture littéraire, le souci de la qualité littéraire. Quand il y a le souci, il n’y a pas forcément le savoir-faire.

 

Ce n’est guère la faute aux « auteurs », et il ne s’agit pas de les accuser. La cause de ce malheur tient sans doute au niveau de culture générale d’une société dominée par la précarité, acceptant tout et n’importe quoi. Nombreux sont les jeunes qui n’ont pas eu la chance de savoir distinguer un grand texte d’un roman de gare. Nombreux sont les jeunes qui entrent en écriture avec une culture littéraire s’arrêtant au XVIIe siècle.

 

Nombreux sont ceux qui n’ont même pas les rudiments de cette culture classique, n’ayant lu en tout et pour tout que la collection Harlequin et d’autres du même genre. Voilà, médiatisation aidant, amateurs de fast food promus au rang de chef cuisinier.

 

Dans cette nouvelle réalité et bénéficiant d’une grande visibilité, une liste qui augmente d’année en année de jeunes romancières produisant des romans qu’on pourrait dire d’amour, des histoires à l’eau de rose avec un fond de mélodrame : histoire d’amour contrariée entre une jeune femme et un homme plus âgé, entre une amante passionnée e dans l’expectative et un homme marié ; malheurs d’une jeune femme d’origine modeste et / ou de tempérament crédule, abusée par un ou plusieurs hommes, jusqu’au jour où elle trouve le véritable amour. Thématique quelque peu éculée, sans surprise ni imagination sur le mode des séries télévisées ou radiophoniques dont la recette est connue : psychologie de bas étage, division des personnages entre les purs et les méchants, clichés. Mais on peut faire de la littérature avec n’importe quel thème. Il suffit d’une langue… littéraire, d’un engagement esthétique et humain.

 

Il est dommage que cet élan, ce vouloir écrire qui anime aujourd’hui ces jeunes « romancières » ne soit pas toujours enrichi par la patience nécessaire à l’excellence et par une plus grande culture littéraire. Dommage pour elles. Dommage pour le lecteur.



21/11/2010
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